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Muter ou non à Saint-Martin (et dans l’académie de Guadeloupe) après Irma ?

mardi 21 novembre 2017, par Bureau SNES-FSU Guadeloupe

À l’heure du choix d’une mutation inter-académique dans l’académie et demain peut être en intra-académique à Saint-Martin, il est important de faire un choix en connaissance de cause, particulièrement après le passage de l’Ouragan Irma, le 6 septembre 2017.

Les deux mouvements sont liés, et souvent l’obtention de l’académie de Guadeloupe risque de déboucher sur une affectation à Saint-Martin en juin. L’extension est souvent le sort réservé à nombre de collègues entrant dans l’académie ou fraîchement titularisés.

Quelle est la situation à Saint-Martin ?

D’abord disons que les fondamentaux de l’avant Irma. Collectivité territoriale régie par l’article 74 de la Constitution, Saint-Martin compte environ 35000 habitants dont près de 37 % de moins de 19 ans.
Pour plus de renseignements sur la réalité démographique, culturelle, linguistique, vous pouvez consulter le rapport annuel de l’iIEDOM et celui de 2016 de l’INSEE.

On retiendra une réalité plus jeune, plus cosmopolite aussi qu’en Guadeloupe avec une composante anglophone, hispanophone, créolophone (Haïti) qui se superpose à la la composante francophone. Beaucoup d’élèves parlent en effet deux ou trois langues, y compris à la maison car les couples mixtes sont nombreux, avec parfois deux ou trois langues qui se mélangent. L’usage du Français a progressé depuis une vingtaine d’années, celui de l’espagnol plus récemment du fait des flux migratoires en provenance de République Dominicaine. L’Anglais reste une langue de communication entre communautés et la langue maternelle d’une majorité de la population. La situation est tout de même variable selon les secteurs de l’île. En 2016, le rectorat évaluait à 82% le nombre d’anglophones au collège de Quartier d’Orléans contre 33% au Mont des Accords et 28% à Soualiga.

Les conséquences en termes d’enseignement sont un faible niveau en français et un bon niveau en anglais et en espagnol. Votre réalité pédagogique ne sera pas la même selon la discipline que vous enseignez. Depuis 2010, au moins,les classes européennes et dispositifs bi langues fonctionnent de façon pérenne en collège et lycée.

La situation du bâti scolaire est problématique tant en qualité qu’en quantité. Écoles primaires sous équipées, collèges saturés (plus de 1000 élèves au collège du Mont des Accords). La Cité scolaire ouverte en janvier 2016 n’a pas résolu le problème. Sous dimensionnée dès sa conception elle abrite un collège (les troisièmes ouvrent en septembre 2018 et un LGT de près de 700 élèves (l’établissement était calibré pour 500...) de la seconde au BTS. Depuis Irma elle accueille aussi le collège de Soualiga, détruit par le cyclone dont on ne sait pas encore où et dans quels délais il sera reconstruit .
Les installations sportives ont été détruites dans leur majorité. On ne sait quand les cours d’EPS pourront se dérouler normalement. Le bâti scolaire a été très durement impacté d’une manière générale. Contrairement aux incantations gouvernementales, l’enseignement ne se fait pas dans des conditions normales (manque de salles, effectifs de classes jusqu’à 40 élèves même en collège, manque de matériel...). En novembre 2017, face aux manquements aux règles de sécurité et d’hygiène depuis la reprise post catastrophe, le SNES a saisi le CHSTC académique.

Si vous songez à scolariser vos enfants dans le privé, il faut savoir que le privé sous contrat n’existe pas à Saint-Martin. Les écoles sont des entreprises disposant d’un agrément du rectorat, aux frais de scolarité élevés (jusqu’à 400 euros/ mois) et aux enseignants moins diplômés que dans le public.

Sur le plan matériel, le coût de la vie à Saint-Martin est plus élevé qu’en Guadeloupe, particulièrement pour l’alimentation (quasiment aucune production locale) et les loyers. Avant Irma il fallait compter 1300 euros mensuels pour un T4. Irma ayant détruit une bonne partie des logements, la pénurie a entraîné une hausse sensible des loyers. Trouver un logement était déjà difficile pour une famille avant l’ouragan... Beaucoup de l’offre immobilière consistait en petits appartements loués à la semaine aux touristes. La reconstruction, supposée se faire sur des bases plus durables, ne sera certainement pas achevée en septembre 2018.
Pour en finir avec les prix, seules les voitures, l’essence ou des produits comme le tabac ou les alcools forts sont bon marché.
Depuis 2013, l’État a diminué l ’indemnité dont bénéficiaient les fonctionnaires mutés à Saint-Martin et à Saint-Barthélémy en remplaçant l’IPSI par l’ISG (14 mois de salaire pour Saint-Martin, 6 pour Saint-Barthélémy).
À l’heure où, après Irma, beaucoup de collègues souhaitent quitter l’île, on appréciera l’irresponsabilité de ce choix. Le SNES n’a eu de cesse de dénoncer cette politique à courte vue.
La fiscalité à Saint-Martin par contre est assez avantageuse (pas de taxe d’habitation, pas de TVA, remplacée par une TGCA à 4%, impôt sur le revenu « allégé »). Cependant si vous arrivez de France Métropolitaine ou d’un département français d’outre mer, vous ne serez pas résident fiscal avant 5 ans (vous paierez l’impôt sur le revenu en Guadeloupe)

Saint-Martin était aussi réputée pour sa vie nocturne et ses loisirs. Sur ce plan aussi, en septembre 2018 l’île ne sera pas revenue à la normale tant les dégâts sont importants. Théâtre, salle de spectacle, cinéma n’existent plus à l’heure où nous écrivons ces lignes. De même on ne peut dire quels clubs sportifs, quelles associations (école de musique par exemple) vont rouvrir. Il faut clairement le prendre en compte quand on a des enfants.

En somme, encore plus qu’avant Irma, muter à Saint-Martin relève d’un choix de vie et il convient de l’envisager dès vos vœux de mutation interacadémique. Pour toutes précisions les membres du bureau du SNES, particulièrement l’auteur de ces lignes sont à votre disposition (guadeloupe@snes.edu, laurent.bayly@wanadoo.fr).